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Introduction

Article paru dans l'Actualité Chimique N°327-328 - février-mars 2009
Rédigé par Fauvarque Jean-François

L’électrochimie est une activité pluridisciplinaire, la protection de l’environnement concerne toutes les activités humaines, électrochimie et environnement ont donc nécessairement des interactions fortes~: comme toute activité humaine, les usages de l’électrochimie peuvent contribuer à la protection de l’environnement ou à sa dégradation.
Les écologistes ont été méfiants, sinon critiques, vis-à-vis de l’électrochimie. Cela se ressent dans les directives européennes et dans les normes de rejet appliquées aux procédés électrochimiques. Ceux-ci étaient en effet loin d’être à l’abri des critiques au milieu du XXe siècle, mais les choses ont bien changé depuis.

La production d’aluminium, premier procédé électrochimique en valeur, a pratiquement supprimé ses rejets d’élément fluor dans l’atmosphère, en France d’abord, puis progressivement dans le monde occidental.

La production du chlore et de la soude, premier procédé électrochimique en tonnage, a été profondément modifiée en France par l’interdiction des diaphragmes en amiante pour les opérations d’électrolyse (utilisation toujours autorisée en Allemagne et aux États-Unis par exemple). Il en est de même pour le procédé au mercure, interdit au Japon, en sursis dans le monde occidental, mais toujours autorisé dans certains pays à l’énergie bon marché qui implantent de nouvelles fabrications.

Il est vrai que les émissions de mercure dans l’environnement sont passées en-dessous du seuil de détection. Le transport du chlore, son usage et son devenir sont sérieusement contrôlés~; il est évidemment normal qu’il retourne à l’eau de mer dont il est issu sous la forme d’ion chlorure. De même en France, les usines de traitement électrochimique de surface ne peuvent plus rejeter d’effluents aqueux et doivent retraiter leurs effluents et recycler l’eau. Les entreprises ont logiquement disparu de la région parisienne où elles n’avaient pas la place de le faire, pour se délocaliser dans des pays moins contraignants.

Ce ne sont pas les procédés électrochimiques qui manquent pour traiter les effluents~: électrofloculation pour précipiter les colloïdes et les émulsions, cellules de dépôt des métaux réductibles~: Zn, Cu, Cd… utilisés dans les traitements de surface, procédés de récupération et de purification des métaux précieux, assèchement des boues par électroosmose, traitement des sols pollués par électromigration, incinération électrochimique des polluants organiques… La purification des rejets par électrodialyse sera détaillée dans la suite.

Mais le service le plus universel que l’électrochimie rend à l’environnement, c’est de pouvoir connaître et mesurer de façon fiable, précise et sensible la teneur en polluants éventuels, comme nous le montre l’article de Nicole Jaffrezic.

L’électrochimie, comme son nom l’indique, couple la chimie à l’électricité, c’est donc une discipline particulièrement importante pour la production et le stockage de l’énergie électrique, effectués par les piles et les accumulateurs. L’électrochimie est devenue un élément essentiel du développement durable.

À l’exception de l’énergie nucléaire (qui n’assure que 15~% des besoins mondiaux), nos ressources énergétiques reposent essentiellement sur l’énergie solaire, qu’elle soit fossile (sous la forme du comburant oxygène de l’air et des combustibles hydrocarbonés) ou déclarée renouvelable (biomasse, hydraulique, éolien, photovoltaïque…). Seul le solaire thermique est utilisé avec un rendement acceptable, mais avec une augmentation considérable d’entropie.

Dans l’ensemble, toutes les formes d’énergie sont encore très mal utilisées. Les pompes à chaleur devraient être généralisées pour l’habitat individuel. De plus des réactions obscurantistes ont provoqué l’arrêt du réacteur nucléaire français de 4e~génération qui fournissait l’électricité avec un rendement supérieur à 40~%, produisait 25~% de moins de déchets de fission par kWe et consommait les actinides dangereux. L’énergie chimique des combustibles fossiles est souvent gaspillée en chaleur basse température. Les centrales thermiques au charbon se multiplient en Chine et vont déverser chaque année dans l’atmosphère des milliards de tonnes de CO2.

Un remède est connu~: la transformation des combustibles hydrocarbonés en hydrogène et CO2 séquestré, ainsi que la production d’hydrogène à partir des centrales nucléaires. Le stockage et le transport de l’hydrogène ont été résolus par le passé. Il est techniquement facile de convertir du CO2 «biologique» ou fatal et de l’hydrogène en carburant liquide pour alimenter les moteurs thermiques existants. Mais la meilleure utilisation énergétique de l’hydrogène se situe avec la pile à combustible. L’énergie chimique contenue dans l’ensemble oxygène (énergie solaire fossile) et hydrogène peut être transformée en énergie électrique avec un rendement de 50 à 70~% (par rapport au deltaH) selon le régime de fonctionnement de la pile. L’article de Thierry Priem fera le point sur cette technologie. Il devient donc important de développer l’électrolyse de l’eau, sous toutes ses formes, pour utiliser au mieux les excédents d’énergie électrique fournis aux heures creuses par les centrales nucléaires, mais aussi par l’énergie éolienne ou le photovoltaïque.

En attendant l’essor de la civilisation hydrogène, l’augmentation du coût des combustibles fossiles impose une meilleure gestion de nos ressources et le recours aux énergies «renouvelables». Le caractère intermittent de leur disponibilité rend indispensable le recours au stockage de l’énergie électrique. Déjà, les supercondensateurs permettent de fournir en quelques dixièmes de seconde la puissance nécessaire à la manœuvre des pales d’éoliennes.

Les batteries d’accumulateurs sont de mieux en mieux adaptées au stockage journalier, voire semainier, de l’énergie photovoltaïque, comme le montre l’article de Florence Mattera. L’énergie éolienne, plus capricieuse, pourrait stocker ses excédents temporaires sous forme de systèmes chimiques redox. Les véhicules hybrides commencent à connaître un succès mérité, grâce aux batteries Ni/MH. Une meilleure utilisation de l’énergie sera encore obtenue avec les hybrides rechargeables, puis avec les véhicules tout électriques.

L’électrochimie joue encore un rôle de premier plan dans le recyclage des matières premières (à plus de 95~% pour le plomb, au moins 70~% pour le cuivre et le cobalt, plus pour les métaux nobles…). C’est vrai pour tous les métaux non ferreux.

En outre, la corrosion métallique en milieu humide (un phénomène électrochimique), particulièrement gênante pour l’environnement, est mesurable et maîtrisable par des méthodes électrochimiques.

Procédés de fabrication propres, procédés de dépollution, gestion optimisée de l’énergie et des matières premières, tels sont les avantages que procure l’électrochimie appliquée à l’environnement.

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